Шарль Гуно
Charles Gounod est
né à Paris le 18 juin 1818 dans un milieu ouvert aux arts.
Remarquable dessinateur, artiste peintre de talent, son père avait
occupé les fonctions de professeur à l'Ecole Polytechnique et de
Maître de dessin des Pages de Louis XVIII. Sa mère, excellente
musicienne, avait été l'élève pour le piano de
Louis Adam et de Hullmandel. Devenue veuve en 1823, elle doit se livrer
à l'enseignement du piano pour subvenir aux besoins de ses enfants. Elle
apprend les premiers rudiments à Charles qui manifeste des aptitudes
musicales précoces.
Au cours de ses
années d'étude au lycée Saint-Louis où il obtient
son baccalauréat de philosophie en 1836, il assiste à la
représentation de l'Otello de Rossini au
Théâtre-Italien ainsi qu'à celle du Don Juan de
Mozart. Ces deux chefs-d'oeuvre constituent les grandes
révélations musicales de sa jeunesse. Gounod vouera toute sa vie
une admiration fervente à Mozart et ne manquera jamais de
célébrer son génie. La découverte de la Symphonie
Pastorale et de la IXe avec des choeurs de Beethoven à la
Société des Concerts redouble son ardeur musicale. Animé
d'un haut idéal artistique, le jeune Charles nourrit l'ambition de
devenir un grand compositeur. Il est l'élève au Conservatoire de
Halévy pour la fugue et le contrepoint, et Lesueur pour la composition.
Au concours de Rome, il remporte un second prix en 1837 et deux ans plus tard,
consécration suprême, le premier prix avec sa cantate Fernande sur
un texte du comte de Pastoret. Avant de partir pour la villa Médicis
à Rome où il doit résider pendant deux ans en
qualité de lauréat de l'Institut, Gounod compose pour la messe
anniversaire de son maître Lesueur, un Agnus Dei à 3 voix
et choeur à propos duquel Berlioz écrit ces lignes
prophétiques: "Tout y est neuf et distingué: le chant,
les modulations, l'harmonie. M.Gounod a prouvé là qu'on peut tout
attendre de lui ".
Le départ
pour Rome ne se fait pas sans quelque déchirement, car le jeune homme
quitte pour la première fois sa mère qu'il affectionne.
Reçu cordialement par Ingres, alors directeur de l'Académie de
France, il noue rapidement des liens d'amitié avec le peintre
partageant une égale passion pour la musique. Gounod l'accompagne au
piano dans des sonates pour piano et violon de Mozart ou de Haydn, lui fait
découvrir l'Alceste de Lulli ou chante de sa voix
merveilleusement expressive ses airs favoris. Il se plaît
également à cultiver ses dons pour le dessin, exécutant
à la demande de son ami "une centaine de calques
d'après des sujets primitifs ". C'est de cette époque
que date le portrait fait par le peintre du jeune Gounod. Le musicien lit Faust
de Goethe et compose des mélodies telles Le Vallon , Le Soir , sur des
poèmes de Lamartine dont le style si personnel se distingue de celui
des romances de salon de l'époque par leur prosodie fluide et leur
raffinement harmonique. Il fréquente assidûment la Chapelle
Sixtine où il s'imprègne de l'art de Palestrina. La musique
sacrée l'entraîne, le transporte. En revanche, le
répertoire dramatique des théâtres romains limité
à Donizetti, Bellini ou Mercadante, le déçoit, ne
trouvant "aucun profit musical à recueillir ". Gounod
rencontre à la Villa Médicis la cantatrice Pauline Viardot qui
l'initie au monde du théâtre, ainsi que Fanny Hensel, soeur de
Félix Mendelssohn. Remarquable pianiste, elle lui révèle
la musique allemande "qui le trouble et le rend fou ".
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De nature
impressionnable, il subit l'ascendant du Père Lacordaire, brillant
prédicateur venu à Rome pour rétablir l'ordre des
Dominicains. Sous son influence, Gounod évolue vers le christianisme
social et songe à embrasser l'état ecclésiastique. Cette
crise mystique s'exaspère au contact de son ami Charles Gay, futur
évêque de Poitiers, arrivé dans les derniers mois de 1839
pour se préparer au sacerdoce. Dès lors, Gounod se consacre
à la musique religieuse. Il se retire au couvent de San Benedetto
à Subiaco pour écrire une messe solennelle qu'il fera
exécuter à l'église Saint-Louis-des Français le 1er
mai 1841, jour de la fête de Louis-Philippe et dont le succès lui
vaut le titre de maître de chapelle honoraire à vie. Pour son
premier "envol" obligatoire, il compose un Te Deum dans le style
palestrinien que Spontini, dans le rapport officiel de l'Institut, sanctionne
en ces termes: "Cette composition est dépourvue de
mélodies, de cantilènes variées, de motifs, d'expression
et de physionomie chantante ".
Il quitte Rome "la
sereine, la pacifiante " pour Vienne où la vie musicale, tant
théâtrale que symphonique, est florissante. Il assiste pour la
première fois à la représentation de la Flûte
Enchantée , noue des relations avec des artistes influents et peut
ainsi diriger au cours de l'hivers 1842-43, deux de ses oeuvres, une Messe
et un Requiem , à la Karlskirche. A Berlin, il retrouve Fanny
Hensel qui l'introduit auprès de son frère, lequel l'accueille
par ces mots: "Ah! c'est vous le fou dont ma soeur m'a parlé
"! Avec son orchestre de la Gewandhaus, Mendelssohn lui fait entendre sa Symphonie
Écossaise , et lui révèle sur l'orgue de la
Thomaskirche les compositions de Bach. Il juge son Requiem de Vienne
"digne de Cherubini " et lui conseille d'écrire de la
musique symphonique. L'oeuvre de Mendelssohn restera pour Gounod "le
plus précieux des modèles ".
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De retour à
Paris en mai 1843, Gounod accepte le poste de directeur de la musique
à l'église des Missions Étrangères où il
impose, non sans mal, aux paroissiens Bach et Palestrina. Pendant cinq ans,
il se soustrait aux séductions du monde, écrivant exclusivement
de la musique religieuse. Il noue toutefois des relations amicales avec
quelques artistes tels Gustave Courbet, Théophile Gautier, Gérard
de Nerval et surtout avec le chansonnier "républicain"
Pierre Dupont, bien qu'il ne partage pas ses idées politiques.
D'octobre 1847 à février 1848, il porte l'habit
ecclésiastique et signe ses lettres l'Abbé Gounod. Tout en se
livrant à des travaux de réflexion notamment sur l'Histoire
comparée des religions , Gounod suit les conférences de
Lacordaire à Notre-Dame ainsi que les cours de théologie de
Saint-Sulpice.
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Mais le musicien,
alors âgé de 30 ans, prend conscience qu'"il n'y a
guère qu'une route à suivre pour se faire un nom: c'est le
théâtre ". Par l'entremise du violoniste Seghers, il
entre en contact avec Pauline Viardot qui venait de créer avec
éclat le rôle de Fidès dans le Prophète de
Meyerbeer. L'incitant à écrire un opéra, elle prend l'initiative
d'imposer par son engagement son premier ouvrage lyrique, Sapho , sur un
livret d'Émile Augier. Si l'oeuvre n'a qu'un succès d'estime,
elle retient l'attention du public et de la critique, qui comprend qu'il ne
s'agit pas là d'un évenement mais d'un avènement musical.
A la Comédie-Française, il fait entendre successivement des
divertissements pour le Bourgeois Gentilhomme ainsi qu'Ulysse ,
tragédie mêlée de choeurs que dirige Jacques Offenbach
à la création en 1852. Pour la première fois, la partition
allait être éditée. "Sauvée de l'oubli !
Rien ne peut donner une idée de ma joie " écrit Gounod.
Peu de temps
après son mariage avec Anna, fille de Joseph Zimmerman, compositeur et
professeur de piano au Conservatoire, Gounod est nommé directeur de l'Orphéon
de Paris, institution chorale recrutant dans les classes ouvrières, puis
un an plus tard, en 1853, directeur de l'enseignement du chant dans les
écoles communales de Paris. Ces fonctions qu'il assume avec un grand
dévouement lui fournissent l'occasion de produire de nombreuses oeuvres
chorales et religieuses, dont la Messe aux Orphéonistes
donnée à Saint-Germain-l'Auxerrois en juin 1853 sous sa
direction.
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Après le
décès de son beau-père, il s'installe dans la
propriété de sa belle-famille à Saint-Cloud où il
résidera une grande partie de sa vie. La même année, son
fameux Ave Maria , déjà populaire dans les salons,
connait dans sa version orchestrale une fortune sans précédent.
Gounod compose le nouvel hymne national Vive l'Empereur en l'honneur
de Napoléon III, exécuté sous sa direction par 1500 voix
à l'Exposition Universelle de 1855. Après l'échec de son
deuxième ouvrage lyrique la Nonne Sanglante , il reprend son Faust
dont il a conçu le projet à Rome. Surmené, en proie
à une grave dépression nerveuse, affection à laquelle il
est sujet, il doit être interné dans la célèbre
clinique du Docteur Blanche. Après un temps de repos forcé, il
compose un chef-d'oeuvre d'esprit et de verve, Le Médecin
malgré Lui.
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Faust est achevé, mais pour cause de
concurrence avec le théâtre de la Porte Saint-Martin, qui
représente un drame sur le même sujet, l'oeuvre n'est
créée qu'en 1859 au Théatre-Lyriqe. Jugé plus savant
qu'inspiré, plus symphonique que mélodique, Faust ne
remporte pas un succès immédiat. De fait, cet opéra de
demi caractère, dans lequel la virtuosité vocale fait place
à un lyrisme mélodique ardent, rompt avec le bel canto italien et
les effets meyerbeeriens si prisés par le public. Il privilégie
le rôle de Marguerite dont il peint les profondes émotions de
l'âme. "Quand je compose, dit Gounod, je me
pénètre du sentiment, des paroles, du caractère du
personnage, et je laisse parler mon coeur ". Conformément
à la tradition, le compositeur doit rajouter un ballet pour
l'entrée de l'oeuvre à l'Opéra en 1869, se
résignant ainsi à assumer "son humiliant métier de
décompositeur de musique ". Jouissant d'une popularité
universelle, Faust symbolise le renouveau de l'art lyrique
français.
Gounod
démissionne de son poste de l'Orphéon et écrit deux
opéras comiques, Philémon et Baucis et La Colombe ,
sur un livret de Jules Barbier et Michel Carré, ses librettistes
attitrés. Bien que jugées comme des modèles de goût
et de finesse, les deux oeuvres ne font pas recette, pas plus que son grand
opéra La reine de Saba . Il revient à l'opéra
poétique, mieux adapté à sa veine lyrique, avec Mireille
d'après Mistral et Roméo et Juliette . Heureux de fuir
Paris qui "l'étouffe et le suffoque ", il les compose
dans le Midi pour s'imprégner de l'atmosphère dans laquelle
évoluent ses personnages. Créé au Théatre-Lyrique
en 1867, Roméo et Juliette , qui soulève un enthousiasme
unanime, marque l'apogée de la carrière dramatique du
compositeur. Épuisé nerveusement par cette période
d'intense activité créatrice, Gounod recherche une fois encore le
calme et l'isolement à Rome, son lieu de prédilection, là
où il aurait toujours voulu vivre. Il donne libre cours à sa
ferveur religieuse en esquissant un "opéra chrétien" Polyeucte
.
Mais la guerre de
1870 interrompt la composition de cette oeuvre qui lui tient tant à
coeur. Accablé par l'état de la France, ne pouvant "vivre
sous le drapeau ennemi ", Gounod se réfugie en Angleterre
avec sa famille. Il y rencontre au cours d'une soirée la chanteuse
Georgina Weldon, qui ne tarde pas à prendre un "ascendant
absolu " sur lui, le poussant à commettre des actions tout
à fait contraires à sa nature. Il est ainsi pendant trois ans
son "protégé" à Tavistock House où il
compose sans relâche, ne cessant d'intenter des procès à
ses éditeurs, refusant enfin le poste de directeur au Conservatoire de
Paris. Lassé, malade, Gounod quitte Londres avec l'aide du Docteur Blanche
et de quelques amis. Il y laisse des manuscrits dont celui de Polyeucte ,
confisqué par esprit de vengeance par Georgina Weldon. Il retranscrit
l'oeuvre de mémoire avec une prodigieuse fidélité.
Très affecté par l'échec de cette oeuvre qui, plus que
toute autre, est la traduction de ses convictions intimes, Gounod disait:
"Périsse mon oeuvre, périsse mon Faust, mais que
Polyeucte soit repris et vive ".
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Ne songeant plus
qu'à "tourner du coté du ciel toutes ses forces de
contemplation ", le musicien travaille presque "à
contrecoeur " à son ultime ouvrage dramatique le Tribut de
Zamora , et compose deux oratorios, Rédemption (1882) et Mors
et Vita (1885), non dépourvus d'effets théâtraux. Dans
les dernières années de sa vie, il déploie une
activité littéraire riche et variée, se fait aussi
critique, rendant compte de la création d'Henry VIII et de Proserpine
de Saint-Saëns qu'il défendra. D'une vitalité inlassable, il
surveille les dernières répétitions de ses ouvrages, qu'il
dirige le plus souvent. Le concert du Chatelet du 4 avril 1890, où il
conduit avec un succès triomphal ses oeuvres, marque sa dernière
apparition en public. Comblé d'honneurs et de décorations, Gounod
conserve jusqu'à la fin de sa vie un tempérament "bon
enfant", toujours prêt à séduire. Animé par la
bonté, tout dévoué à ceux qui viennent le
solliciter, il crée instinctivement autour de lui un courant de
sympathie et d'affection dont il a si profondément besoin. Malgré
une santé défaillante, il assiste aux concerts de musique
sacrée des Chanteurs de Saint-Gervais, entame un diptyque musical sur Saint-François
d'Assise et écrit sa dernière mélodie Tout
l'univers obéit à l'amour .